Il était une fois ...20

Mon premier sandre ! 

Ah ! l'adolescence heureuse de mes jeunes années, elle est bien loin maintenant, mais je conserve toutefois quelques bons souvenirs de cette période ou, probablement à tord, on ne se souciais pas encore du réchauffement climatique et de ses conséquences futures ...

C'était aussi l'époque ou les revues halieutiques, comme "la pêche et les poissons" que j'achetais souvent nous abreuvaient de photos de Sandre que l'on commençait à capturer un peu partout en France.

Ce carnassier, de la famille des percidés a fait polémique lors de son apparition en France au début du vingtième siècle, un peu comme le Silure aujourd'hui. Les premiers capturés en Europe de l’ Est l’ont été dans le Rhin en 1888 puis en France dans la Meuse en 1912, le Doubs en 1915 et la Saône et 1920.

Très souvent capturé avec des techniques qui ne lui étaient pas vraiment destinées comme le vif, des méthodes, comme le poisson mort manié ou la tirette sont apparu rapidement permettant de leurrer plus facilement ce prédateur discret et assez difficile à trouver.

Sa chair, malheureusement pour lui, est excellente, il est donc très recherché pour cela et encore aujourd'hui, beaucoup de pécheurs ne le remettent pas à l'eau, même durant la période de reproduction ou les mâles qui montent la garde sur les nids sautent sur tout ce qui s'approche et se trouvent piégés bien trop facilement.

Contrairement au brochet, il se déplace souvent en groupe, sauf peut-être les plus gros spécimens et ses mœurs restent assez mystérieux surtout à cette époque.

Nous allions, très souvent avec mon père pêcher sous le barrage de Tours sur Marne ou nous avions une vielle barque qui prenait l'eau pour nous déplacer entre les îlots formés ici ou là. Le leurre de l'époque restait exclusivement les bonnes vielles cuillères et mon père affectionnait particulièrement ceux de la marque "Mepps" or et argent numéro 3 à 5.

Le problème avec ces cuillères armées d'un hameçon triple de bonne taille, c'était qu'elles avaient une fâcheuse tendance à s'accrocher sur le fond ou dans les branches immergées surtout sur ces zones de fort courant, on pouvait en laisser plusieurs très rapidement, ce qui faisait râler mon père à chaque fois, car c'était lui qui alimentait le stock ...

Pour ma part, c'est avec l’insouciance de la jeunesse, sans me rendre compte du montant de ces leurres que je prenais énormément de risques dans les zones favorables en laissant bon nombre de ces cuillères au fond ...

Ce jour-là, alors que nous peignons consciencieusement depuis un gravier, la zone amont cette île pour moi et l'aval pour mon père, ma cuillère "Mepps aglia argent en taille 4" s'immobilise soudain, me laissant penser que je suis accroché au fond !

Mais au moment où je tire sur la ligne pour tenter un décrochage désespéré, ça bouge tranquillement, je reprends donc mon action de mouliner en ramenant ce poids mort lentement et c'est seulement en arrivant devant moi, à quelques mètres que j'aperçois un "éclair", c'est un beau poisson que je n'avais pas l'habitude de capturer ...

J'avais déjà vu des sandres, mais uniquement en photos, aussi devant cette prise inattendue et en plus de belle taille, j'ai échoué rapidement ce poisson sur le gravier et je me suis précipité dessus pour assurer sa capture sans penser à son arête dorsale menaçante, très pointue et je me suis enfoncé cette dernière dans la main !

Mais cette douleur ne pouvait rien enlever à ma motivation et j'ai donc lâché ma canne pour saisir ce poisson avec les deux mains, mais au niveau de l'opercule, ce sont véritablement des lames de rasoir qui protègent l'accès aux branchies et cette action entraîna une violente coupure et des saignements, sans compter la douleur !

Il m'en fallait plus pour renoncer, j'arriverais quand même à mettre au sec ce sandre en appelant mon père à la rescousse, mais ce dernier arrivera sans se presser pour autant et il me retrouva avec les mains en sang, mais aussi avec ce joli sandre de 76 cm dans les bras, nous sommes le 16 juin 1976, je suis aux anges !

Ce sandre, nous l'avons mangé, pas de "no kill" à cette époque ...


Moi en 1976 avec mon 1er sandre !

Mon père nous a quitté sans jamais avoir eu l’opportunité de capturer un sandre, il faut dire qu'il pêchait exclusivement à la cuillère et avec des gros modèles, des numéros 5 très souvent, sa cible principale était le brochet.

Avec le recul, je me dis que ce jour-là, j'ai, d'une part, eu de la chance, mais aussi, il faut bien l'avouer, en prenant plus de risques sur certaines zones propices, j'augmentais considérablement les probabilités de se raccrocher au fond, mais aussi, mes chances de capturer un prédateur opportuniste comme ce sandre, ce jour-là !

Des sandres, depuis, j'en ais pris d'autres, mais il m'aura fallu attendre encore un peu et c'est surtout en pêchant au  vif que j'ai eu le plaisir de les croiser, avant l'arrivée des techniques plus modernes, mais ce diable de poisson, même s'il n'a pas une défense extraordinaire n'est pas toujours facile à leurrer.

Mon premier sandre était de bonne taille et je pense que mon père était finalement très fier de moi ce jour-là, même s'il ne me l'a jamais dit, ce moment restera inoubliable !

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